KONGOLISOLO
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Devoir de mémoire : 1984-1994, la chute définitive de l’apartheid; en 1984, le gouvernement sud-africain a tenté un double pari, (signés entre le président Mozambicain Samora Machel et le ministre sud-Africain des Affaires étrangères Pieter Willem Botha, les accords de Nkomati engagent le Mozambique à expulser les membres de l’ANC présents sur son territoire en échange de la fin du soutien sud-africain à la RENAMO); « Alors, le régime sud-africain appelle des élections dans le cadre d’une nouvelle Constitution qui établit un Parlement tricaméral (Noir, Blanc et Indien), mais le pari est raté – le Front démocratique uni (UDF), emmené par l’ANC, boycotte l’élection et l’opinion internationale est plus que jamais hostile au gouvernement de Pretoria (comme en témoigne l’attribution, cette année-là, du prix Nobel de la paix à l’archevêque Desmond Tutu) »

Un an plus tard, le Congrès des syndicats sud-africains (COSATU) était créé, avec un objectif stratégique. En effet, depuis son institutionnalisation en 1948, le système d’apartheid, au-delà de son aspect idéologique, fonctionne avant tout sur le monopole économique de quatre millions de Blancs/Occidentaux sur la terre, les emplois, les ressources minières et les services sociaux au détriment d’une vingtaine de millions de Noirs/Africains..

L’apartheid a notamment permis à la classe moyenne blanche d’être relativement protégée du chômage, et aux professions libérales d’être épargnées de toute concurrence, les Sud-Africains Noirs diplômés et qualifiés devant s’exiler pour trouver un emploi. Confrontée à un marché intérieur étroit, à des millions de Noirs sans pouvoir d’achat, à la difficulté croissante d’exporter sa production, du fait d’un boycott, d’une pénurie de main-d’œuvre qualifiée et de grèves impliquant des centaines de milliers de mineurs, l’économie sud-africaine est au au bord de l’asphyxie.

La puissance militaire sud-africaine, affaiblie par l’embargo sur la vente d’armes, a atteint ses limites face à la coalition cubano-angolaise lors de la bataille de Cuito-Cuanavale en 1988. Le régime, qui ne pouvait plus maintenir une armée en dehors de l’Afrique du Sud , s’engage, en échange du retrait des troupes cubaines d’Angola, à mettre fin à l’occupation sud-africaine du Sud-Ouest africain, qui devient indépendant, sous le nom de Namibie, le 21 mars 1990. Parallèlement, les négociations entre le régime et l’ANC s’accélèrent avec le départ de Pieter Botha et l’arrivée au pouvoir en août 1989 de Frederik de Klerk. Faisant la première visite d’un président sud-africain Blanc en Zambie immédiatement après son arrivée au pouvoir, de Klerk s’est entretenu avec le président Kaunda, puis a rencontré les présidents de l’ANC et des pays de première ligne. Le 2 février 1990, il annonce d’un bloc, devant le Parlement, (la levée de l’interdiction de l’ANC, du PAC, du Parti communiste sud-africain et de trente et une autres organisations illégales; la libération des prisonniers politiques emprisonnés pour des activités non violentes; l’abolition de la peine capitale; et la levée de diverses restrictions imposées par l’état d’urgence).

Le 11 février 1990, devant les caméras du monde entier, Nelson Mandela, accompagné de sa femme Winnie Madikizela, est libéré. Deux semaines plus tard, l’ex-prisonnier politique se rend à Lusaka (Zambie) pour remercier tous les chefs d’État d’Afrique australe et centrale qui ont soutenu la lutte contre l’apartheid et entame bientôt une tournée internationale pour remercier ses plus fidèles partisans, parmi lesquels notamment les régimes cubains de Fidel Castro et les régimes libyens de Mouammar Kadhafi. Dans les capitales Africaines et Européennes, où il remercie les comités qui se sont battus pour sa libération, il est accueilli avec tous les honneurs. Aux États-Unis, sa visite en juin 1990 est soutenue par le Free South African Movement (FSAM), une organisation soutenue financièrement par TransAfrica. À New York, il a souligné dans son discours qu'(un cordon ombilical impossible à couper reliait les Noirs d’Afrique du Sud et les Noirs d’Amérique parce que nous étions tous des enfants d’Afrique).

Dans toutes les villes nord-américaines qu’il visite, il est accueilli par des élus, des intellectuels, des religieux et des entrepreneurs Noirs, ainsi que des milliers d’anonymes, certains ayant combattu l’apartheid depuis 1948, d’autres étant nés pour le militantisme à partir du simple slogan (Free Nelson Mandela). Remerciant tout le monde, Mandela refuse en revanche de plier devant le maire de Miami, qui exclut de l’accueillir tant qu’il soutiendra Fidel Castro, ou devant les médias américains qui, en plus d’attribuer sa victoire finale à la clémence du gouvernement sud-africain Blanc, lui demander de se dissocier de Yasser Arafat et de condamner l’usage de la violence. (C’est toujours l’oppresseur, pas l’opprimé, qui détermine la forme de la lutte, justifie Mandela, non sans leurrer la répression qui s’abat sur les Noirs, en Afrique comme en Amérique. Si l’oppresseur utilise la violence, l’opprimé n’a pas le choix, mais de répondre par la violence).

Applaudissant cette intransigeance, les Noirs sont persuadés qu’une révolution se prépare en Afrique du Sud, alors que l’opinion publique est sceptique, voire alarmiste, sur l’avenir de l’Afrique du Sud. Après une période de transition effectivement insurrectionnelle, marquée notamment par l’assassinat en avril 1993 du leader noir Chris Hani, qui représentait un courant populaire et radicalement anticapitaliste au sens de l’ANC, le parti de Mandela s’engage à poursuivre une politique de croissance , d’emploi et de redistribution qui renforce le pouvoir des milieux financiers et qui préserve largement les avantages économiques et sociaux acquis par les Blancs sous l’apartheid. Le 27 avril 1994, sur la base d’un consensus avec les tendances libérales, nationalistes et socialistes, Nelson Mandela est le premier président noir élu d’Afrique du Sud avec 62% des voix.

Lors de sa prestation de serment le 10 mai 1994, souhaitant que (jamais plus ce beau pays ne connaisse l’oppression d’un homme par un autre), Mandela annonce de nouveaux objectifs, qui s’appliquent à son peuple, mais en réalité, relèvent les défis de tout le continent Africain : « Nous avons enfin réalisé notre émancipation politique. Nous nous engageons à libérer toutes les personnes de la servitude, de la pauvreté, des privations, de la souffrance, du sexisme et d’autres formes de discrimination ». Par ce discours, qui se termine par un salut à toute l’Afrique (« God Bless Africa ! »), Mandela s’engage à faire de son pays, qui est alors la première puissance économique, financière et industrielle du continent, une terre de justice et progrès social. Se rendant au sommet de l’OUA à Tunis en juin 1994, son premier sommet en tant que chef de l’État, il commence son discours en évoquant la destruction de Carthage et des grands empires Africains avant d’énumérer une liste de personnalités qui ont permis à l’Afrique de se libérer de l’oppression.

Appelant à ce que la question de l’apartheid soit retirée de l’agenda de l’OUA, Mandela annonce vouloir mettre la nouvelle Afrique du Sud sur la voie de la Renaissance africaine, un concept qui vise à redonner à l’Afrique les moyens de mener à bien son développement selon ses propres critères. Le thème de la Renaissance africaine, repris par son successeur Thabo Mbeki, va ainsi être introduit dans le débat qui s’élève à la fin des années 1990 sur la nécessaire réforme de l’OUA.

la chute

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