Le MPLA, qui entend construire la nation et rassembler tous les Angolais sans distinction ethnique, est en concurrence avec l’Union des populations du Nord de l’Angola (União das populações do Norte de Angola, UPNA), fondée en 1957 dans le pays Bakongo, à cheval sur les territoires coloniaux français, belges et portugais. Très vite, l’UPNA élargit sa base pour devenir en 1962, le Front National de Libération de l’Angola (Frente Nacional de libertação de Angola, FNLA). Pendant ce temps, le leader du FNLA, Holden Roberto, obtient le soutien des États-Unis pour prendre la tête d’un Gouvernement de la République d’Angola en Exil (GRAE) installé à Léopoldville, tandis que les Portugais sollicitent le soutien du régime. de Prétoria. L’Angola devient la courroie de transmission de l’impérialisme entre le Congo et l’Afrique du Sud.
Cet enjeu est devenu manifeste lorsqu’en 1966 Jonas Savimbi a quitté le FNLA pour fonder l’Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola (União Nacional para an Independência Total de Angola, UNITA). Développant un discours révolutionnaire maoïste teinté de tribalisme, l’UNITA profite de la propagande raciste des Portugais pour recruter des combattants, au détriment du MPLA ou du FNLA. Traversés par des questions d’ethnicité, d’origine sociale et de couleur de peau, ces mouvements, unis le jour contre le colonialisme portugais, se déchirent la nuit selon l’ethnie, les intérêts personnels de leurs dirigeants et les contacts qu’ils entretiennent avec les puissances étrangères.
Car dans ce pays devenu stratégique et regorgeant de diamants et de pétrole, les alliances évoluent au gré des intérêts. D’abord favorables à l’UPA-FNLA, les États-Unis se sont rapprochés de Lisbonne à la fin des années 1960, le président Richard Nixon voyant dans les autorités portugaises un allié contre l’adversaire communiste au moment où la Chine et Cuba s’engagent à leur tour en Angola.
Au Mozambique, Eduardo Mondlane parvient à regrouper les mouvements indépendantistes au sein du FRELIMO, créé en 1962 à Dar es Salaam. Après deux ans de négociations infructueuses avec Lisbonne, le FRELIMO lance une lutte armée en 1964. Le soutien de la Tanzanie conduit les forces portugaises à bombarder le sud de ce pays afin de couper les circuits d’approvisionnement et le repli militaire des soldats du FRELIMO vers ce pays. Après l’assassinat de Mondlane à Dar es Salaam en février 1969, l’un de ses protégés, un cadre militaire nommé Samora Machel, lui succède. Machel décide de s’inspirer d’Amílcar Cabral en formant des cadres et en développant des programmes de santé et d’éducation populaire dans les campagnes. Cependant, outre les clivages idéologiques et ethniques, la marche vers la libération est freinée par des mouvements clandestins financés par les États-Unis et l’Afrique du Sud, qui fusionnent en 1975 au sein de la Résistance nationale mozambicaine (RENAMO).
Dans le maelström qui s’installe peu à peu en Angola et au Mozambique, l’OUA semble, une fois de plus, dépassée. Bien que l’organisation africaine montre son soutien à l’effort mondial contre l’occupant portugais, ses membres jouent à nouveau leur rôle individuellement. La situation en Afrique orientale et australe, où perdurent des régimes colonialistes et racistes (Afrique du Sud, Rhodésie du Sud, colonialisme portugais) qui déstabilisent la région, mérite une politique commune. les dirigeants nationalistes et panafricanistes assument un soutien politique et personnel direct aux mouvements de libération.
Le premier, Julius Nyerere, dirige le comité de libération de l’OUA basé à Dar es Salaam en fusionnant diplomatie tanzanienne et diplomatie panafricaine. Le second, discret mais incontournable, est Kenneth Kaunda, qui réussit en 1964 à obtenir l’indépendance politique et pacifique de la Zambie (ancienne Rhodésie du Nord britannique). Les deux hommes établissent un axe diplomatique et politique entre leurs deux pays, ce qui permet à de nombreux combattants et réfugiés sud-africains, mozambicains et rhodésiens (Zimbabwe) d’avoir une base arrière au cœur de l’Afrique australe. Ainsi, à partir des années 1960, le Comité de libération organise le boycott diplomatique et économique du Portugal et de l’Afrique du Sud, ainsi que la prise en charge de la formation des armées de libération. En offrant la citoyenneté tanzanienne à tous les réfugiés africains et afro-américains, Nyerere donne également un sens à l’idée de citoyenneté africaine. En réformant sa propre armée et sa politique diplomatique, il inspire les armées et états-majors mis en place par les mouvements de libération de l’Afrique lusophone.
Sentant la situation lui échapper militairement malgré la répression accrue, le Portugal tente d’augmenter massivement les investissements afin d’acheter la paix sociale et de conserver ce qui peut l’être. Mais Lisbonne est de plus en plus isolée. Au début des années 1970, le régime colonial perd le soutien de l’Église catholique, tandis que l’aide économique de l’OTAN ne suffit plus à équilibrer le budget grevé par les dépenses militaires. Le 25 avril 1974, des officiers de l’armée coloniale prennent le pouvoir à Lisbonne.
La (Révolution des Œillets) est assumée par le Mouvement des Forces Armées (Movimento das Forças Armadas, MFA), présenté par Agostinho Neto (Comme le quatrième mouvement pour l’indépendance après le MPLA, le FRELIMO et le PAIGC). Mais les conséquences de la lutte de libération ont été dures pour les nationalistes d’Afrique lusophone. Malgré la survie d’un parti politique commun, l’union entre la Guinée-Bissau et le Cap-Vert n’a pas survécu à l’indépendance, qu’ils ont obtenue respectivement le 10 septembre 1974 et le 5 juillet 1975. Au Mozambique, après l’indépendance accordée le 25 juin, 1975, la RENAMO obtient le soutien des gouvernements de Rhodésie (Zimbabwe) et d’Afrique du Sud pour déclencher une guerre civile contre le gouvernement dirigé par le FRELIMO.
En Angola, le 11 novembre 1975, au nom du MPLA, Neto a proclamé l’indépendance de la République populaire d’Angola. Le FNLA au Nord et l’UNITA au centre du pays ont proclamé conjointement la naissance de la République populaire et démocratique d’Angola, entraînant le pays dans une guerre civile qui, alimentée par l’Afrique du Sud, durera plusieurs décennies.