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Devoir de mémoire – Aimé Césaire Vs Senghor : Homme d’État en sa qualité de premier Président du Sénégal indépendant, Léopold Sédar Senghor était aussi admiré pour ses écrits et sa philosophie ; il est considéré comme l’un des pionniers du courant littéraire (Négritude); cependant, il eut aussi des détracteurs comme on peut le découvrir dans le texte inédit ci-dessus d’Aimé Césaire, qui était aussi un écrivain martiniquais du courant Négritude; « Le texte qui suit est une véritable avalanche de critiques d’Aimé Césaire contre Senghor; (Senghor me dénigre à la télé ! D’abord, il dispose des médias pour me dénigrer régulièrement, sans m’accorder le droit de réponse dans les mêmes conditions), c’est un manque de sportivité »

Comme d’habitude, toutes ses affirmations me concernant sont radicalement fausses, comme on le verra :

  • En premier lieu, contrairement à ce qu’il dit, j’ai obtenu la peau d’âne qu’est le doctorat de lettres, doctorat d’état, avec la mention honorable, il y a de cela 18 ans, et ce fait s’était estompé dans mon esprit d’adulte comme tant d’autres du même genre. Alors Senghor a sciemment menti à la télévision, à des fins d’intoxication.
  • En second lieu, l’ouvrage qu’il cite comme étant ma thèse (antériorité des civilisation Noires) et dont il aurait lu la partie linguistique, je ne l’ai écrit qu’en 1967, c’est-à-dire sept ans après ma soutenance, et il ne contient presque pas de partie linguistique, à peine quelques comparaisons entre le Wolof et l’égyptien ancien, mais, qui de ce fait, échappent à la compétence de Senghor. Par conséquent, il s’agissait seulement de prendre une attitude pédante et avantageuse devant les téléspectateurs.
  • En troisième lieu, mes thèses ne se confondent pas avec celles d’aucun auteur, rivet, Moret, Breuil, Etc. Sinon comment expliquer l’acharnement avec lequel les milieux conservateurs et nationalistes m’ont combattu et m’ont voué une haine tenace pendant près de trente ans.
  • Quatrièmement, j’ai déjà dit dans (Nations Nègres), page 138, (1ère édition) et 187 (2ème édition) et dans (Taxaw) numéro 3, page 6 que mes travaux apportent quelque chose de nouveau par rapport non seulement aux thèses du hamburger, mais aussi de (M.N. Reich). C’est à cette occasion que j’ai défini l’éthique du chercheur à laquelle Senghor est bien incapable de s’astreindre. Il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut pas entendre.
  • Senghor dit à la télévision une phrase digne de Maître Aliboron, qu’il ne répétera jamais, (mélangeant) les noms aurignaciens, Moret, Breuil, Rivet, Etc. Qu’on s’est bien gardé de reproduire le lendemain dans la presse et qui montre qu’il prend les téléspectateurs sénégalais pour des ignorants. Nous attendons toujours des traces écrites dans une revue scientifique de ces idées qu’on prétend avoir recueillies dans les cours imaginaires desdits professeurs pendant la période de 1930 à 1954, date de parution de (Nations Nègres); j’aurais pu m’arrêter même en 1948, date de mon article intitulé (Quand pourra-t-on parler d’une véritable renaissance culturelle Africaine ?). Oui en attendant un texte, même antidaté.
  • Si Senghor a suivi, en réalité, ou même en imagination, les enseignements qu’il cite sur les idées dont nous débattons aujourd’hui, pourquoi n’a-t-il pas fait des travaux dans ce domaine qui devrait précéder le mien de plusieurs décennies ?? Comment expliquer cette carence ?? Au chapitre II de (Nations Nègres) et au numéro 3 de (Taxaw) p.3 Etc. J’ai clairement montré la nocivité pour l’âme Africaine de ce que Senghor appelle la Négritude. Que celle-ci triomphe et l’Afrique Noire ne sera plus. Comment donc des idées que j’ai passées toute ma vie à combattre, pour la survie de nos peuples, pourraient-elles m’influencer ??

Revenant à ma défense, je rappelle que plus d’un demi-millier de personnes l’avaient assisté à la Sorbonne, elle dura sept heures et a été une véritable bataille intellectuelle sans concession, sous les yeux de tous les jeunes étudiants Africains présents à Paris. À la fin, c’était un sentiment général de fierté très communicative qui animait toute l’assistance Africaine car personne ne se trompait sur le sens profond et l’importance de l’événement : la culture africaine non folklorique venait de forcer les portes de l’ancienne Sorbonne . Les Africains commençaient à perdre leur complexe pour de bon.

D’autres Africains, présents aujourd’hui à Dakar, seraient mieux placés que moi pour décrire le contexte général de ces faits. Les choses s’étaient passées ainsi parce que j’avais refusé, on le sait, toutes les solutions de facilité habituelles, qui auraient hypothéqué ma liberté de pensée. C’est une tradition à l’université que quiconque prend de tels risques en paie le prix. C’est le cas des meilleurs penseurs français d’aujourd’hui, surtout quand ils sont progressistes et c’est tout à leur honneur : Roger Garaudy, Henri Lefebres, Gilbert Murry, Michel Butor, Louis Althusser. Celui-là même dont Senghor faisait l’éloge à la télévision.

Dans le journal le monde du 16 juin 1976 page 19, le professeur Olivier Reboul de l’université de Strasbourg écrit : depuis Vatican II, on se demandait ce qu’était devenu le saint office. Il semble qu’il fonctionne encore, sinon à Rome, du moins en France au sein de l’université, sous le titre anodin de comité consultatif.

Dans le monde de l’éducation, en février 1976, on lisait que la commission consultative des universités avait refusé d’inscrire Michel Butor sur la liste d’aptitude aux fonctions de maître de conférences, ce qui permettait à l’Université de Genève de recruter Michel Butor. On apprend maintenant que le philosophe Louis Althusser vient de subir le même refus. Cela signifie que des professeurs de renommée mondiale qui ont enseigné quinze ans à l’étranger – je peux attester que Louis Althusser est l’un des rares philosophes français dont on parle – ne peuvent pas avoir ici le rang de professeur ou mieux de maître de conférences chez nous ! « On rédige des thèses sur eux, mais eux n’ont pas le droit de diriger des thèses. Althusser fait partie de ces penseurs grâce auxquels on ne peut plus penser tout à fait comme avant. Je ne suis pas fier d’être professeur dans une université qui refuse ce titre à Butor et Althusser ».

Un agrégé de lettres est un professeur de lycée qui doit travailler encore dix ans pour devenir docteur d’État, afin de posséder ainsi le diplôme le plus élevé que l’université délivre dans sa branche. Senghor traîne le complexe de la thèse de médecin d’État, cette peau d’âne qu’il ne pourra jamais posséder. Aussi ne sait-il pas qu’en doctorat de lettres, les mentions de bien et de très bien, dont il parlait d’un air savant à la télévision, n’existent pas ! C’est ce complexe qui le conduit à collectionner les faux titres (les titres bidons), sans valeur, de docteur honoris causa glanés dans toutes les universités du monde, pour tenter en vain de combler le vide qu’aurait occupé le vrai doctorat. Ce qui ridiculise le peuple sénégalais aux yeux du monde cultivé !

Demain, pour utiliser les moyens de l’État à des fins de promotion personnelle, il faudra voter une loi rendant la fonction de Président de la République du Sénégal incompatible avec la quête ou l’obtention de distinctions sans rapport avec le développement du pays. Un jour une commission sera créée pour étudier les implications budgétaires des complexes intellectuels de Senghor. Sur la question du plagiat, je me réfère au (Taxaw) numéro 3, je ne suis que la énième victime avec Hamani Diori, (détérioration des termes de l’échange) ; Président Bourguiba (Francophonie); la Pira (civilisation de l’universel) ; Camus (homme politique); Ousmane Socé (mixité culturelle); Césaire (négritude); André Blanchet (balkanisation); Gaston Deferre (horizon 80, devenu horizon 2000 ou 2001). Nous ne pouvons qu’être fiers de ce travail. Rien n’est plus triste qu’un chercheur qui ne trouve rien. Si nous nous bornions à réciter les connaissances acquises à l’école, sans rien y ajouter par nos propres découvertes, l’humanité serait à l’âge primitif. Ce qui fait donc la valeur de l’intellectuel, c’est sa contribution réelle au progrès des connaissances de son temps.

Ainsi, dans le cas particulier du réglage fin, chacun doit indiquer explicitement sa contribution ; il suffit de se référer à mes travaux pour voir qu’en sciences humaines, ils ont des connaissances avancées dans les disciplines suivantes : archéologie, préhistoire, anthropologie, physique, histoire, égyptologie, linguistique, histoire de la philosophie, sociologie, ethnologie, Etc. Dans les sciences exactes, nous avons introduit au Sénégal, dans le cadre du transfert de technologie, un ensemble de techniques nucléaires d’avant-garde ; nous contribuons régulièrement au progrès des sciences de la terre, même dans le cadre de programmes internationaux, Etc. En quoi Senghor, qui n’a jamais contribué au progrès d’aucune science, même linguistique, se sentirait-il qualifié pour porter un jugement sur mon travail ?? Enfin, sur un plan plus général, nous avons donné à la culture Africaine ses lettres de noblesse, en la réconciliant avec l’histoire et en créant pour la première fois les bases scientifiques de la linguistique diachronique Africaine.

Les linguistes Africains s’apercevront bientôt que notre ouvrage intitulé : (Rapport génétique entre l’égyptien pharaonique et les langues négro-africaines), inaugure l’ère de la révolution linguistique Africaine. Aussi, j’espère que cet ouvrage, ainsi que (l’Antiquité Africaine par les images et la physique nucléaire et la chronologie absolue), seront diffusés correctement sans délai au Sénégal, faute de quoi, je serai obligé de prendre des mesures ! Aujourd’hui presque toutes les idées que j’ai défendues dans le temps sont tombées dans le domaine commun. Mais que ceux qui étaient restés à l’écart à l’époque auraient bien voulu me les servir avec désinvolture.

Aimé Césaire, le vrai père de la Négritude, l’Inventeur de ce concept, dit de notre ouvrage (Nations Nègres et culture dans Discours sur le colonialisme), qu’il est le (livre le plus audacieux qu’un Nègre ait jamais écrit), témoignant , par ce jugement, à la nouveauté des idées contenues dans (Nations nègres) par rapport à la Négritude elle-même et aux difficultés qu’éprouvaient alors les intellectuels Africains à croire ces thèses qui leur semblaient trop belles pour être vraies.

Nous avons décidé d’éliminer Senghor de la vie politique sénégalaise pour le plus grand bien du peuple sénégalais. « L’émotion est Nègre, la raison est hellénique ». (Léopold Sédar Senghor).

Aimé Césaire

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