KONGOLISOLO
Actualité

Devoir de mémoire : confession de Ngunz Kali-I-Bond ! Chers compatriotes, Kongolaises et Kongolais, pourquoi trahir les siens, pourquoi faire du mal et faire massacrer son peuple ? Tout se paye ici-bas dans la vie; le prix de la trahison c’est la mort, raison pour laquelle les traîtres finissent mal; que l’exemple de Ngunza Kali-I-Bond serve de leçon aux Kongolais exerçant une parcelle de pouvoir ! Tout est vanité après tout ! « Peu avant sa mort, Ngunz Karl-iI-Bond était méconnaissable, il ressemble à un squelette en mouvement; sur cette photo, Ngunz est assis, en novembre 2002, à côté de l’actuel Modeste Muthinga, alors sénateur pro-Kabila, aujourd’hui ministre des Affaires sociales et de l’Action humanitaire de la République démocratique du Kongo »

Dans sa dernière grande interview, Ngunz a demandé pardon aux Kongolais. Delphin Bateko avait rediffusé cette interview à la mémoire de l’ancien Premier ministre du Zaïre (aujourd’hui RD Kongo) Ngunz Karl-i-Bond, décédé le 27 juillet 2003 alors que le pays s’engageait sur la voie de (la démocratisation et du retour de la paix). Voici son entretien avec le journal Le Potentiel (quotidien publié à Kinshasa) le 9 novembre 2002.

Ngunz Karl-I-Bond : je salue le courage et les convictions politiques d’Etienne Tshisekedi !

  • Ngunz Karl-I-Bond poursuit sa longue convalescence. Victime d’une hémorragie cérébrale aggravée par un infarctus du myocarde, l’ancien Premier ministre de Mobutu, tombé dans un coma profond à Kinshasa, a été admis le 25 mai 1994, à l’hôpital militaire pour blessés graves en Afrique du Sud. Depuis trois mois, l’ancien président national de l’Uferi avait perdu toutes ses facultés motrices : mémoire, parole. Une paralysie générale l’avait rendu totalement dépendant. Il a fallu 18 mois de réapprentissage pour parler et marcher. Ngunz Karl-I-Bond, que nous avons rencontré dans son luxueux appartement de la (Rocklands Residence), dans le quartier de Sea Point à Cape Town, a remercié le Seigneur de (lui avoir rendu sa mémoire). Même s’il a perdu son flow habituel et qu’il lui faut quelques instants pour construire son discours, Karl-I-Bond qui (se dit venir de loin), a sensiblement retrouvé ses réflexes d’homme politique.

Le Potentiel :

  • Premier Ministre, Ministre des Affaires Etrangères, Ambassadeur, Président National (d’Uferi). Autant de fonctions que vous avez exercées. Quel est le poste qui vous a le plus marqué et auquel vous vous identifiez aujourd’hui ??

Ngunz :

  • J’aime me présenter comme ministre des affaires étrangères. J’ai occupé tous les postes sauf celui de président de la République. Et même si j’en étais devenu un, le ministère des Affaires étrangères reste l’une des fonctions les plus prestigieuses d’une carrière politique. J’aime toujours me présenter comme ministre honoraire des Affaires étrangères.

Le Potentiel :

  • Quel est votre état de santé aujourd’hui ??

Ngunz :

  • Mon cher frère, merci d’être venu me rendre visite. Il y a trois ans, je ne pouvais pas te reconnaître, j’avais perdu la mémoire, la parole. Je n’ai rien entendu. J’ai fini dans un hôpital en Afrique du Sud. On me dira que j’y étais déjà depuis plusieurs mois sans pouvoir me souvenir de ce qui s’était passé. Aujourd’hui que j’ai retrouvé toutes mes facultés, je dois louer le Seigneur qui m’a rendu ma mémoire et remercié les médecins sud-africains qui m’ont ramené à la vie.

Le Potentiel :

  • Une certaine opinion Kongolaise soutient que vous avez été empoisonné par Mobutu.

Gunz :

  • Non, Non, Non. Sinon Mobutu aurait pu tuer tous ceux qui le contredisaient. Les médecins pensent que je me suis livré sans répit à une intense activité politique depuis plusieurs années. La période de la Conférence nationale et de la transition a été très difficile à gérer. J’ai reçu un contrecoup. (Je n’ai pas été empoisonné par Mobutu).

Le Potentiel :

  • Vous êtes tenu responsable du massacre des chrétiens le 16 février 1992 à Kinshasa. Avant cette répression, vous aviez suspendu (de force) les travaux de la Conférence nationale souveraine.

Ngunz :

  • Vous savez que j’appartenais à une famille politique. Je n’étais pas le commandant suprême des forces armées Kongolaises. J’étais chef du gouvernement, mais les forces de sécurité et d’ordre dépendaient du président de la République.

Le Potentiel :

  • Vous avez pourtant initié l’épuration ethnique au Katanga. Des statistiques concordantes indiquent plus ou moins 550 000 morts.

Ngunz :

  • Au cours de ma carrière politique, j’ai certainement commis des erreurs. La purge des Kasaïens du Katanga n’était pas mon œuvre personnelle. Le président Mobutu et Kyungu wa Kumwanza portent de lourdes responsabilités sur cette question. Cependant, j’ai appris avec une grande satisfaction que Kyungu avait été expulsé d’Uferi. Mais Lukonzola qui dirige actuellement notre parti ne peut prétendre aujourd’hui être le seul dirigeant de cette grande formation politique. Il a l’obligation d’associer le Dr Muketa à la direction politique du Parti.

Le Potentiel :

  • Vous n’êtes donc pas concerné par le nettoyage ethnique des Kasaïens au Katanga ??

Ngunz :

  • J’ai longuement discuté de cette question avec les grands chefs coutumiers du Kasaï en vue d’une réconciliation avec leurs frères du Katanga. Avec le grand chef Kalamba (le père), nous avions, avant ma maladie, convenu d’organiser officiellement cette cérémonie autour du feu conformément à nos coutumes. Je me souviens qu’il m’a demandé de localiser mon village qui se trouve à moins de 10 km de Luiza dans le Kasaï Occidental. Nous avons le même sang et nos peuples frontaliers parlent la même langue. Emery Kalamba, le successeur du grand chef, a fait le même pas. Il est venu me rendre visite ici en Afrique du Sud. Tout doit être fait pour parvenir à cette réconciliation avant les grands événements politiques. L’analyse de toutes les péripéties de cette purge macabre montre qu’il s’agissait d’une stratégie qui consistait à éviter, pour des raisons électorales, le rapprochement entre les Baluba du Kasaï et du Katanga qui ont pourtant les mêmes origines. Ce que je dis vient du fond de mon cœur. C’est une vérité : le jour où Katangais et Kasaïens s’uniront pour les mêmes objectifs politiques et économiques, le pays se redressera. Je présente mes excuses 5 fois aux familles des victimes, à mes frères du Kasaï et à tout le peuple congolais pour ce qui s’est passé au Katanga. Nous devons bannir les démons de la haine pour une vraie réconciliation. (Je m’excuse 5 fois auprès de mes frères du Kasai).

Le Potentiel :

  • Depuis votre hospitalisation, Mobutu a été expulsé, Laurent Kabila qui lui a succédé a été assassiné, Joseph Kabila est maintenant au pouvoir, et le pays est envahi par des armées étrangères et divisé par la rébellion. Qu’est-ce que vous pensez ??

Ngunz :

  • Je suis très triste de voir mon pays en décomposition avancée. Le Kongo était un grand pays. Rien n’a été décidé sur le continent africain sans que nous soyons consultés. Sur le plan international, le Kongo était la route obligée des grandes puissances avant d’entreprendre toute action militaire en Afrique subsaharienne. Il semble que le pays n’ait plus de politique étrangère. Tous ceux qui parlent au nom de la RDKongo sont d’illustres inconnus. En diplomatie, cela compte beaucoup. (Le Kongo était un grand pays).

Le Potentiel :

  • Que faut-il faire ??

Ngunz :

  • Les Kongolais doivent d’abord se réconcilier et travailler ensemble dans un gouvernement d’union nationale pour donner la paix et de la nourriture au peuple Kongolais qui a trop souffert. Avant tout, ils doivent s’engager sur la voie de la démocratie, afin d’éviter la légitimité issue des armes.

Le Potentiel :

  • Quel est votre projet politique ??

Ngunz :

  • Les médecins m’ont demandé de tourner définitivement le dos à la politique. Aujourd’hui, je suis condamné, sur leur prescription, à accomplir quatre actions par jour : (prendre des médicaments, manger, respirer l’air plein d’oxygène qui vient de la mer et dormir).

Le Potentiel :

  • Le dernier mot ??

Ngunz :

  • Je salue le courage et les convictions politiques d’Etienne Tshisekedi. Il était dans toutes les batailles. Je salue également l’attachement de Maman Marthe, son épouse. Eux aussi doivent prendre soin de leur santé. Je pense que des personnalités comme Tshisekedi ou Kengo, s’ils ont encore un peu d’énergie, peuvent contribuer à améliorer l’image du Kongo. (Hommage à Tshisekedi).

Propos recueillis par Modeste Mutinga, rédacteur en chef du quotidien Le Potentier

confession

Articles similaires

Laisser un Commentaire