Le Coran, texte sacré de l’Islam, ratifie l’existence de l’esclavage (voir sourate XVI, Les abeilles) tout comme les textes bibliques. À noter que le premier muezzin désigné par le Prophète pour l’appel à la prière est un esclave noir nommé Bilal, originaire d’Éthiopie.
La loi islamique ou charia, qui s’appuie sur le Coran et les paroles du prophète (hadith), considère qu’en terre d’Islam, seuls les enfants d’esclaves et les prisonniers de guerre sont des esclaves. (Elle autorise également la réduction en esclavage de toute personne originaire d’un pays non musulman; si un esclave se convertit, il n’est pas affranchi).
Très tôt, du fait de la rapidité même de leurs conquêtes, les Arabes se heurtèrent à une pénurie d’esclaves. Ils ne peuvent asservir les populations des pays soumis à leur droit et sont donc obligés d’importer de plus en plus d’esclaves de pays tiers, qu’ils soient ou non en voie d’islamisation. « Comme les chrétiens du haut Moyen Âge, ils s’abstiennent d’asservir leurs coreligionnaires mais cette règle souffre de nombreuses transgressions et on n’hésite pas à asservir les musulmans, notamment noirs, sous prétexte que leur conversion est récente ».
Une économie basée sur l’esclavage.
L’esclavage devient rapidement l’un des piliers de l’économie de l’empire abasside de Bagdad grâce aux nombreuses captures de guerre et à l’avènement d’une bourgeoisie urbaine très riche. Pour s’en convaincre, il suffit de lire Les Mille et Une Nuits, un recueil de contes arabes censé se dérouler sous le règne du calife Haroun al-Rachid, contemporain de Charlemagne. « Les harems du calife et des notables de Bagdad étaient remplis de Circassiens. Ce sont des femmes originaires du Caucase et réputées pour leur beauté; ces belles esclaves continueront jusqu’au XXème siècle à approvisionner les harems orientaux en concurrence avec les beautés noires venues d’Éthiopie ».
Pour les tâches domestiques et le travail dans les ateliers et les champs, les sujets du calife utilisaient d’innombrables esclaves venus des pays slaves, de l’Europe méditerranéenne et surtout de l’Afrique Noire. « Ces esclaves sont maltraités et souvent mutilés et castrés. D’autres esclaves et eunuques étaient employés comme soldats et chefs de guerre par les différentes dynasties musulmanes, du Maroc à l’Inde. Ces esclaves accèdent tantôt à des postes élevés, tantôt au pouvoir suprême. Il en fut ainsi des célèbres Mamelouks d’Égypte, que Bonaparte dut combattre en 1798 ».
Eunuques et castration.
Inventée et développée à grande échelle par la Chine impériale, exportée dans les pays musulmans et jusqu’en Italie (les castrats), l’exploitation des eunuques (hommes castrés) est l’une des formes d’esclavage les plus inhumaines qui soient. Elle poursuit deux objectifs principaux. « Empêcher les esclaves étrangers de s’enraciner; éviter les relations sexuelles entre les femmes du harem et leurs servantes. (les castrats sont également recherchés par les mélomanes pour leur voix à la fois puissante et très aiguë) ».
La castration consiste en l’ablation des organes génitaux, soit totale, soit limitée aux testicules (pour empêcher la reproduction). Elle est le plus souvent pratiquée à la préadolescence et entraîne une mortalité épouvantable. « Les esclaves mâles d’Afrique noire sont généralement castrés en Égypte par des moines coptes pour le compte de trafiquants musulmans. À l’époque carolingienne, les captifs slaves destinés aux marchés orientaux étaient castrés à Verdun, en France, principal marché d’escale de ce trafic ».
Esclaves Blancs/Occidentaux en terres islamiques.
Aux premiers temps de l’Islam, les notables de Bagdad s’approvisionnaient en esclaves Blancs/Occidentaux auprès des tribus guerrières du Caucase, mais aussi auprès des marchands vénitiens qui leur vendaient des prisonniers venus des pays slaves, encore païens. « Des époques, alors que le vivier slave s’épuisait en raison de la christianisation de l’Europe de l’Est, les musulmans se tournèrent vers les pirates qui parcouraient la Méditerranée. (Ces derniers effectuent des raids sur les villages côtiers des côtes européennes, y compris même dans l’océan Atlantique jusqu’aux limites du cercle polaire) ».
En 1627, des barbares algériens lancent un raid sur l’Islande et ramènent 400 captifs. Le souvenir des combats menés par les habitants contre ces pirates perdure dans la tête d’un prisonnier maure qui sert d’emblème à la Corse. On estime que plus d’un million de personnes ont été enlevées en Europe occidentale entre le XVIe et le XVIIIe siècle, à l’époque de François Ier, de Louis XIV et de Louis XV. « Ces esclaves, surtout les hommes, sont exploités des pires manières dans le monde, (les orangeraies, les carrières de pierre, les galères et même les chantiers de construction d’Afrique du Nord) ».
Les organisations chrétiennes mettent beaucoup d’énergie à racheter ces malheureux, comme Miguel de Cervantes ou plus tard Saint Vincent de Paul. En Europe de l’Est et dans les Balkans, durant la même période, les Ottomans prirent environ trois millions d’esclaves. « Jusqu’au début du XIXe siècle, les princes des côtes nord-africaines tiraient eux-mêmes de grands profits de la piraterie en imposant de lourds tributs aux armateurs occidentaux en échange de la garantie que leurs navires ne seraient pas attaqués par des pirates. (En 1805, le président américain Thomas Jefferson lança une expédition navale contre le dey de Tripoli, en Libye, pour le forcer à renoncer à ce racket. Le dey d’Alger le poursuivit jusqu’à la conquête française en 1830) ».
Esclaves Noirs/Africains en terres islamiques.
Si la traite des Blancs/Occidentaux rencontra rapidement la résistance des Européens, il n’en fut pas de même pour la traite des noirs en provenance du continent Africain. La traite des esclaves arabes débuta en 652, vingt ans après la mort de Mahomet, lorsque le général arabe Abdallah ben Sayd imposa aux chrétiens de Nubie (les habitants de la haute vallée du Nil) la livraison de 360 esclaves par an.
La convention très formelle aboutit à un traité (bakht) entre l’émir et le roi de Nubie Khalidurat. Ce trafic va donc continuer à augmenter. Les musulmans (Blancs/Occidentaux) de la frange sahélienne (Peuls, Touaregs, Toubous etc.) multiplient les attaques contre les villages bantous de la forêt et enlèvent les meilleurs éléments pour les vendre aux habitants de l’Empire Ottoman ou du Maroc.
Les spécialistes estiment que le nombre de victimes Noires/Africaines du trafic arabe au cours du dernier millénaire, du VIIe au XXe siècle, se situait entre douze et dix-huit millions d’individus. C’est à peu près autant que la traite négrière européenne à travers l’océan Atlantique du XVIe au XIXe siècle. Le trafic suit initialement les routes transsahariennes. Des caravanes vendent, à Tombouctou par exemple, des chevaux, du sel et des produits manufacturés. « Ils repartent l’année suivante avec de l’or, de l’ivoire, de l’ébène et donc des esclaves pour rejoindre le Maroc, l’Algérie, l’Egypte et, au-delà, le Moyen-Orient. Est. Au XIXe siècle, le commerce maritime se développe également entre le port de Zanzibar (aujourd’hui en Tanzanie) et les côtes de la mer Rouge et du golfe Persique ».
Le sort de ces esclaves, pillés par des chefs noirs à la solde de marchands arabes, est dramatique. Après l’épuisant voyage à travers le désert, les hommes et les garçons sont systématiquement castrés avant d’être mis sur le marché, au prix d’une mortalité effrayante, ce qui fait dire à l’anthropologue et économiste Tidiane N’Diaye : le chapitre douloureux de la déportation des Africains. en terre d’Islam est comparable à un génocide. Cette déportation ne se limite pas à la privation de liberté et au travail forcé. Il s’agissait également – et dans une large mesure – d’une véritable entreprise planifiée de ce que l’on pourrait décrire comme une extinction ethnique par castration.
Les contes des Mille et une Nuits, écrits à l’époque du calife Haroun al-Rashid (et Charlemagne), témoignent des mauvais traitements infligés aux esclaves noirs et du mépris à leur égard (alors qu’ils étaient musulmans comme leurs maîtres). Ce mépris, légitimé par la malédiction de Cham, a persisté au fil des siècles. Ainsi peut-on lire sous la plume de l’historien arabe Ibn Khaldoun (1332-1406) : il est vrai que la plupart des Noirs/Africains s’habituent facilement à la servitude; mais cette disposition résulte, comme nous l’avons dit ailleurs, d’une infériorité d’organisation qui les rapproche des animaux bruts.
D’autres hommes ont peut-être consenti à entrer en état de servitude, mais c’était dans l’espoir d’accéder aux honneurs, aux richesses et au pouvoir (les Prolégomènes, IV). Ces remarques précèdent de deux siècles la traite négrière atlantique des Blancs/Occidentaux.
Esclavage et décadence
Les très importants contingents de main-d’œuvre servile ont contribué à la stagnation économique du monde musulman en décourageant l’innovation technique et sociale. Ils ont également causé beaucoup de problèmes. C’est ainsi qu’à la fin du IXe siècle, la terrible révolte des Zendj (ou Zenj, d’un mot arabe qui désigne les esclaves noirs/africains), dans les marais du sud de l’Irak, conduisit l’empire de Bagdad sur le chemin de la ruine. et la décadence. « Comparée à la traite négrière européenne, la traite négrière dans le monde musulman a commencé plus tôt, a duré plus longtemps et, plus important encore, a touché un plus grand nombre d’esclaves. écrit l’économiste Paul Bairoch en résumé) ».
Cet auteur constate qu’il ne reste quasiment aucune trace d’esclaves Noirs/Africains en terre d’Islam en raison de la généralisation de la castration, des mauvais traitements et d’une mortalité très élevée, alors que leurs descendants sont au nombre d’environ 70 millions sur le continent américain. « Cependant, il faut noter que l’islam Noir/Africain, directement inspiré du maraboutisme local, s’est souvent rebellé contre la corruption de la traite Négrière aussi au Sénégal, l’imam d’Adrar, a lancé le mouvement Toubenan en 1673 (terme dérivé de le mot wolof Tabwa qui signifie repentir) dans le but de lutter contre le despotisme et la corruption des notables locaux, qui contribuaient au commerce de la honte ».
Pendant plus d’un an, Iman et son armée ont réussi à remettre de l’ordre dans la région, mais les partisans locaux de l’esclavage ont de nouveau reçu le soutien des Négriers Occidentaux qui leur ont fourni des armes et des mercenaires pour repousser ce mouvement qui menaçait leurs intérêts économiques. « Les dirigeants du mouvement Toubenan furent finalement vaincus et déportés en esclavage vers les Amériques où ils contribuèrent à plusieurs autres révoltes (dans le nouveau monde) l’esclavage en terre d’Islam persiste depuis puis en Mauritanie où le peuple touareg à la peau blanche continue d’appliquer les règles de la servitude contre les Noirs/Africains d’origine Bantoue ».
Sources : Revue Hérodote -Alban Dignat